Au petit matin
Deuxième jour de vacances après dix jours de vacances. Un rythme à reprendre. Curieux, se lever à 7H00 tous les matins des vacances et avoir envie de dormir le jour de la rentrée... Le travail est un bon somnifère, faut croire.
Les gosses entrent, s'assoient à leur place et déballent leurs affaires. Je fais de même, un peu embrumé.
A peine ai-je le temps de poser mon sac - ouais un sac, pas de cartable en cuir pour ma part, un sac à dos, comme un jeune branleur - que je suis assailli.
"Maître, Maître, hein dis, y a pas de "t", là ?"
Quoi ? Quoi ? Qu'est-ce que c'est ? Qu'est-ce qui se passe ? D'où ça vient ? Ah là... Je fais la mise au point et voit un élève qui me tend un cahier ouvert, à la première page. Je vois, sur la couverture cartonnée, des écritures. C'est un verbe conjugué.
"Hein, y a pas de "t" là ?" Il m'aide, il pointe son doigt sur ce dont il parle. Le verbe "partir" est conjugué, au présent. Je lis.
"Mon père i dit qu'il y en a un, mais y en n'a pas, hein ? Hein, Maître, c'est moi qu'a raison ! Pasque mon père il dit que si et il s'est énervé"
Je lis de nouveau "Je parts ; tu parts ; il part..."
"Non il n'y a pas de "t" aux deux premières personne, tu as raison, tu pourras le dire à ton papa."
"Ben voilà j'en étais sûr... J'ai encore pris une claque dans la gueule pour rien."
"Heu..." Hésitation. Silence. Scotché. Devant les limites de mes compétences.