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Coup de pompe
Jeudi. Premier du mois de mai. Jour férié. Le plus férié de tous. Tout est fermé, d'autant plus que s'offrait aux salariés la possibilité de faire un pont non négligeable.
Alors qu'un peu partout en France on défilait, sous des banderoles diverses, oriflammes du mécontentement général, je décidai d'aller chercher de l'essence. On a la citoyenneté qu'on mérite.
Je me dirige vers l'automate disponible 24/24 le plus proche (formidable travailleur : toujours dispo, pas de salaires, pas de charges). J'arrive dans un paysage des plus déprimants qui soit malgré le soleil radieux qui trône dans le ciel bleu. Et les papillons qui volent et les oiseaux qui font cui-cui et les jolies fleurs dans les champs alentours... Une zone commerciale, un jour férié. Tout est dit dans l'apposition de ces deux groupes nominaux... Au moins ça me permet d'éviter la cohue des jours ouvrables, c'est toujours ça de pris.
J'arrive à la pompe. Des vieux sont là. Deux couples de grisonnants à l'air plutôt friqués.
Je stoppe mon véhicule de façon à avoir à dérouler le moins de tuyau possible. L'idéal recherché est de n'avoir juste besoin de décrocher puis de retourner le pistolet avant de l'enfoncer dans le méat gourmand de mon véhicule.
Je descends et me poste devant la machine, minablement humanisée par l'ajoût d'une voix de cyborg qui se voudrait féminine.
Un des hommes arrive vers moi.
Avec un fort accent anglais il m'explique que sa carte de crédit ne fonctionne pas dans ces appareils et qu'il a besoin d'essence et que comble de malchance tout est fermé aujourd'hui en France. D'ailleurs il s'empresse d'ajoûter : "En France quand tout fermé, tout fermé". Eh ouais mon coco. Le mythe de la France paralysée a la vie dure. Mais il ne s'est pas forgé sur rien. Nous sommes une nation de gros branleurs qui ne pensent qu'à ne rien foutre c'est bien connu. République Fainéante.
Le type a l'air sympa bien que je sente poindre des idées libérales derrière ses propos. Il a un billet de 50 euros dans les mains. J'ai compris où il voulait en venir mais je lui permis de parfaire son français en le laissant m'expliquer sa requête.
Il veut que je lui fasse le plein, enfin pour 50 euros, avec ma carte et qu'il me règle en espèces ensuite.
J'accepte. Je suis pas un fumier.
Je fais mon code. Et je propose au deuxième type de remplir le réservoir de leur caisse. Par confiance. A peine lui ai-je proposé que je me dis : "Merde, il peut m'enfler comme il veut ce con-là.... Pourquoi avoir confiance dans deux couples de vieux anglophones ? Pourquoi pas ? Putain... Faut que je reste le temps qu'il remplisse. Ouais mais je vais passer pour un type qui se la joue cool mais qui fait pas confiance. Une pensée pour le solde de mon compte en banque. Et hop ! pendant qu'il remplit je discute avec l'autre. J'apprends qu'ils vont à Conques. Qu'ils viennent de Nouvelle-Zélande. Qu'ils ont une maison dans la Saône (friqués, j'en étais sûr...). Bla-bla. L'autre s'arrête. Il annonce : "Quarante-neuf euros soixante-dix".
Je fais le mec réglo. Je fouille dans mes poches faisant semblant de chercher la monnaie. Il rigole et disant que c'est bon (j'espère bien !!!). On se salue. Je pars.
J'ai vite écoulé son billet, y a pas mal de faux qui traînent, surtout de ceux de cinquante...
C'était Grokonar prend de l'essence n°3 ou comment donner une image sympa de ses compatriotes à des étrangers venus des antipodes un jour férié.
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